Le village de Saint-léger-du-Bois

Saint Léger a eu la particularité de changer souvent de nom dans son histoire. Tour à tour, Saint Pierre, Saint Ligier du Bois, Bois Nègre pendant la Révolution Française. Désormais, Saint Léger tient son nom de sa situation géographique. Elle était autrefois située en pleine Forêt. Courtépée relève qu’il y avait là deux églises, l’une consacrée à Saint Pierre qui a pu donner son nom au village à une certaine période, l’autre à Saint Léger où étaient les moines, qui est devenu l’église paroissiale. L’église de Saint Pierre, désaffectée, a servi de carrière pour la construction du pont sur la Drée lequel, trop étroit, sera démoli et reconstruit en 1931.

La recherche de feux de 1475 dénombre, sous le contrôle de d’Estienne Marelli, vicaire, environ 110 habitants serfs à Saint Ligier, au Grand Moloy 12 foyers, à Lally 10 foyers, au Petit Moloy 9 foyers, à Noiron 7 foyers, à Champsigny 9 foyers, à Raigny 5 foyers à champécuillon 4 foyers.

En 1645 la terre de Saint Léger appartient au petit fils du Président Jeannin, marquis de Montjeu. Le rapport de l’époque décrit ainsi les lieux :

Courtépée décrit :

Saint Léger est assis en un bas où il y a une rivière, preys et le fond est assez bon pour semer toutes graines. Estienne Billard et Nicolas Vieillard sont eschevins et collecteur de tailles. Il y a 60 habitants imposés dont trois veuves et trois charrues… Jean Berthault amodiateur qui a 2 charrues à luy et 2 metayers; lequel ne paye la taille qu’à discrétion quoy qu’il puisse porter plus que les trois laboureurs dudict Saint Léger. Ils sont mainmortables et ont assez d’amples communaux et champoys, ne doivent rien, ont eu la compagnie de gens d’armes de Monseigneur le Prince qui a logé deux jours, ont eu leurs bleds gelés au bas comme aussy leurs vignes.

Saint léger du Bois, dépendait de la paroisse de Lally qui était le fief dominant dont dépendait également Champsigny et Champecueillon ces seigneuries ont eu une importance historique fondamentale dans le paysage léodégardien. Tout d’abord Le nom de Lailli qu’on écrit aujourd’hui Lally vient de laeliacum villa de Laelius. La voie romaine passe à proximité immédiate d’une maison forte qui faisait partie du domaine des évêques d’Autun.

Au XIIIème siècle l’évêché a inféodé cette seigneurie à un Laïque et en 1389 Guillaume, seigneur de Lally, assigne une rente de deux livres tournois et deux setiers de froment à sa terre de Lally pour l’Abbaye de Saint Martin d’Autun. La visite de feux de 1475 recense à Lally une forteresse et 10 feux serfs. Les sujets de la seigneurie sont donc mainmortables. La « main morte » est l’héritage d’un droit féodal en vertu duquel les serfs étaient privés de disposer de leur bien. Lorsqu’ils n’avaient pas d’enfant, c’est le seigneur qui héritait. Courtépé précise qu’en 1487 le seigneur de Lalli accorde aux habitants le droit de champoyer sur le finage et en 1492 le droit à ceux du Grand Moloy de pêcher et faire rouire le chanvre dans la rivière Lacanche.

En 1521 sous le règne de François 1°, la seigneurie de Lally est achetée par Denis Poillot Docteur es droit, conseiller du roi en ses grands conseils et parlement de Bourgogne, seigneur de Santenay. Il va reconstituer le fief en rachetant Essertenne, village, terres et seigneurie. Personnage influant, proche du pouvoir royal, ayant à sa disposition d’excellents sculpteurs, il va introduire à Autun le style renaissance, concrétisé par la chapelle de Notre Dame du Châtel d’Autun. Les fenêtres Renaissance et les communs du château de Lally sont probablement de sa gouvernance.

Denis Poillot avait épousé Jeanne de Musset , grand-tante du poète Alfred de Musset. Il décède à Paris en décembre 1534. Sa petite fille Jeanne Clutin épouse le noble seigneur Jéhan de la Palut, escuyer, seigneur de Meilly, de Bouligneux et chevalier. Ce dernier fut Elu de la Noblesse de Bourgogne et pendant un siècle les seigneuries de Meilly et Lailly restèrent dans les mêmes mains. En 1722 la seigneurie devient propriété des neveux Rouscel de Medavy qui firent construire le pont de Lally. En 1755, Jean Baptiste de Mac-Mahon écuyer à Autun prend possession des terres de Lally, Essertenne, Grand Moloy, et Veuvraille pour la somme de 39 773 livres. Lailly va rester propriété de la famille Mac Mahon par une suite de successions jusqu’en 1893, date à laquelle le capitaine de Mac Mahon vendait à Monsieur Antonin Grillot les terres de Lally, le château, granges et moulin.

Marie Grillot, épouse de Louis Perreau de Nolay va céder la propriété à Monsieur Bacot actuel propriétaire, lequel s’active à redonner son lustre au château. Mais Lalli est aussi connue pour ses carrières. Celle de Vergenne contenait, dit-on, un atelier de sculpteur gallo-romain. Les carrières de Lalli, suivant l’annuaire de Saône et Loire de 1843, renfermaient une grotte avec une mare dont on ignorait l’étendue. Suivant une légende, cette grotte était le témoin d’un souterrain qui aurait permis de conduire les pierres jusqu’à Autun… Quoiqu’il en soit, cette pierre au grès très fin, mais fragile dans le temps aurait servi à la construction de la cathédrale d’Autun et de l’église du collège (actuelle église Notre Dame).

La justice expéditive de l’époque rendait difficile le travail de négociateur. La dague et l’épée passaient avant la plume et le sceau. La recherche de feux du baillage d’Autun de 1475 recense à Chaulsigny, dans la paroisse de Saint Léger du Bois, 9 feux serfs, alors sans forteresse. A la fin du XV ème siècle Chancigny appartient à la famille de Bournonville. Et particulièrement à Jehan de Bournonville, écuyer, seigneur du lieu. Un registre des « jours de la justice de Chancigny » laisse entendre que c’est sous son action, vers 1525, que fut édifié l’actuel château. La porte forte du pont levis et la petite porte à pilastres cannelés ainsi que l’entablement de la tour escalier sont de bon style renaissance. Il semble que ce soit l’œuvre de l’architecte qui a travaillé pour Denis Poillot à Lally dans la même période.

Anne Jeanne de Rouvray épouse de messire Louis De Pernes, Comte d’Epinac, entre en possession du fief. En 1697, Pierre de Morey conseiller aumônier du Roy, prieur de Mesvres, acquiert par décret les terres de Chancigny et Champécueillon. La seigneurie de Chancigny intègre alors les importantes propriétés de la famille Morey. Très fortunée ,cette famille aura une implantation locale immense. De Pierre à Claude, receveur des décimes autunois en 1736 qui prendra le titre de Claude De Morey De Chancigny, puis Marquis de Vianges après l’érection en marquisat de Vianges-Sully, c’est enfin Messire Lazare de Morey, gouverneur de Vézelay, qui va cumuler l’ensemble des terres de ses frères et des titres qui leurs sont attachés.La famille possède les terres de Manlay, Igornay, Chancigny, champécueillon et Sully. Lazare avait épousé à 68 ans sa jeune cousine Charlotte le Belin qui va hériter de l’ensemble des propriétés.

Par son mariage avec le docteur Jean Baptiste Mac Mahon, médecin de la famille et très proche de celle ci, les propriétés Morey vont entrer dans ce qui va devenir la dynastie Mac-Mahon en 1754. En 1803 c’est Maurice François et en 1831, Edme Patrice Maurice de Mac Mahon futur Maréchal de France, Duc de Magenta, et président de la république qui va résider au château de Chancigny. Il fit à cette occasion ériger une croix en pierre au carrefour des chemins de Lally et Chancigny sur le socle de laquelle il fit graver ces mots: Erexit christo / M. Mac Mahon / Dux Magenta / 1859 . Patrice, son fils, Général et second duc de Magenta hérite des propriétés qu’il cède à son fils Maurice Marie. Patrice de Mac Mahon avait épousé la princesse Son Altesse Royale Marguerite d’Orléans, qui lui a donné quatre enfants, deux fils et deux filles dont Maurice Marie Marquis de Mac Mahon et 3 ème Duc de Magenta qui va hériter de Champcigny.

Aujourd’hui c’est la petite fille de Maurice de Mac Mahon , Madame Marc Le Tanneur qui est propriétaire du château. Les armes de sont ancêtre, épouse du Maréchal, Elisabeth De La Croix Castries figurent au fronton de la porterie. S’ils furent de moindre importance les fiefs de Rigny et de Champécueillon furent tout deux impliqués au XVIème siècle dans les bouleversements provoqués par les guerres de religions. Ainsi le fièf de Rigny appartenait à la famille DEVOYO, famille protestante qui va conserver ses propriétés durant près d’un siècle malgré les saccages perpétrés par les belligérants. François Guitton de Rigny, nouveau propriétaire, va transformer l’ancienne demeure seigneuriale et adjoindre une maison bourgeoise. Il va impulser l’artisanat de la taille de pierre de grès sur le village. Les carrières nombreuses sur la commune nécessitaient une main d’oeuvre importante. On vit ainsi arriver au village des carriers de la Creuse par familles entières.

Les délégués à l’Assemblée Constituante étaient Jean Méreau, laboureur , et Nicolas Fichot marchand. L’industrie Schistière qui débouche sur la fabrication d’huile va démarrer dans la région d’Autun en 1841. La concession de Saint Léger-du-Bois fut attribuée en 1846 à Mr Montmorency et De Boissy. Elle avait une superficie de 515 ha et comprenait Sully. L’exploitation avait lieu à ciel ouvert de Saint Léger à Bouton et de Saint Léger à Moloy. Une usine fut installée à proximité de l’extraction permettant la commercialisation de 40 litres d’huile brut par m³ de schiste extrait. A partir de 1876, l’extraction se fit par puits et galeries, en particulier le puits Saint Georges qui avait 191m de profondeur. Ces activités vont cesser en 1889, car dès 1885, la nouvelle Société des Schistes Bitumineux, englobant 10 concessions permettait la rectification des huiles lourdes qui avait lieu surtout dans l’usine de Saint Léger, laquelle avait une capacité de traitement de 60 milles hectolitres par an.

La concession de Lally s’étendait sur 278 ha. Elle avait été attribuée en 1864 à Monsieur Queulain, banquier à Cambrai. L’exploitation dirigée par un ingénieur des mines de Saint Étienne comprenait 15 mineurs, un chef mineur, un machiniste un receveur et un cheval. La Couches d’une puissance de 3,2m n’était pas homogène. Après distillation en cornue dans l’usine de Champsigny, la concession de Lally produisait, en 1868, 327 540 litres d’huile brut. L’arrivée régulière en 1870 du pétrole Américain va provoquer l’effondrement des cours et la fermeture des puits. En 1904, Saint Léger qui comptait 1015 habitants employait encore 15 ouvriers dans les carrière de grès qui constituaient la seconde richesse géologique de Saint Léger. Le grés de Saint Léger s’est formé dans les mêmes périodes que les schistes au Permien. Il est composé des sables déposés par les fleuves qui dévalaient des montagnes environnants le site de l’Autunien. Les compressions dues à l’empilement des strates de l’évolution géologique firent le reste.

Saint Léger produisait également des vins ordinaires, un peu durs, assez colorés durant 2 ou 3 ans, en particulier sur le mont Frivaut (411 m d’altitude) lequel sépare les vallées de la Canche et de la Drée par deux cols, Moloy et Crâme. Le Mont Frivaut par ses vignes du passé a abreuvé nos grand-pères léodégardiens de piquette, râpeuse certes, mais qui les rendait gaillard à la tâche. La petite « vigne du Mathieu » qui subsiste toujours en Moloy atteste de cette époque, car ici, la montagne qui montait, les puits de mines qui descendaient, le charbon qui poussièrait, et le schiste qui bituminait, il faisait soif. Pas moins de 13 cafés assuraient cette lourde charge.

L’église de st Léger date du 19ème siècle. Elle fut reconstruite progressivement et en cinq étapes à partir de 1854 et avec les matériaux de l’ancienne chapelle. La façade très majestueuse pour une église de campagne, ainsi que le clocher seront terminés en 1875. Elle abrite une statue en bois polychrome de St Antoine datant du 15 ème siècle, la cloche qu’il porte rappelle « peut être »celle qui pendait au coup des cochons « antonins » et servait aux moines à attirer la population dans les villes. On trouve également un Saint Sébastien en bois polychrome du XVII ème siècle. Le baptistère de l’époque romane, taillé et sculpté à partir d’un masif carré a été classé au titre de monument historique en 1910. Aujourd’hui St Léger du Bois compte 535 léodégardiens et léodégardiennes.